La correspondance du botaniste Alexandre Boreau
Le 07/02/2024 à 17h50 par Alain Terrienne
Résumé

Les 3500 lettres scientifiques reçues par Alexandre Boreau pendant sa carrière (1835-1875) ont été numérisées avec le soutien de la DRAC Pays-de-la-Loire.

Le botaniste Alexandre Boreau (1809-1875) reste le personnage central de l'histoire de la botanique à Angers. Son travail important sur la flore du Centre de la France lui a valu la faveur de ses contemporains, un travail sans précédent pour des études « régionales ». Sa situation de directeur du Jardin des plantes d'Angers, un établissement majeur de 1850 à 1875 le plaçait au sein d'un important réseau français. En effet plus de 200 botanistes apparaissent dans son imposant herbier (100 000 récoltes sans doute).

Le legs du botaniste d’origine saumuroise à la ville d’Angers en 1875 comprenait également sa correspondance professionnelle qui vient enrichir la collection. Elle reflète l’activité du botaniste (plus de 420 auteurs !) et dévoile les échanges d’idées autour de la botanique : déterminations, divergences de nomenclatures, études anatomiques, retours de voyages, querelles par personnalités interposées… On retrouve des modestes botanistes en formation, des amateurs éclairés : curés de village, gradés à la retraite ou pharmaciens, ou encore des confrères directeurs d’établissements et même des personnalités scientifiques d’importance nationale. Certaines lettres sont uniques : une simple demande de détermination sur un lot de plantes envoyées par malle-poste ou train ; à l’inverse d’autres témoignent d’une correspondance suivie pendant des années entre Boreau et des confrères proches.

 

 

 

Biographie

 

Alexandre Boreau (1803-1875) est un botaniste français né à Saumur ; malgré des origines modestes, il a développé très tôt un intérêt pour la botanique. Après avoir débuté en pharmacie à l'âge de 17 ans, il s’inscrit à des cours de botanique au Jardin botanique d'Angers, cultivant ainsi une passion pour la discipline. Sa santé fragile retarde ses études, mais dès 1826, il suit les cours de Jussieu et Mirbel à Paris, réussissant brillamment l'examen botanique de l'Ecole de pharmacie.

En 1827, Boreau devient pharmacien à Nevers, libérant ainsi du temps pour des activités botaniques. Son intérêt pour la flore de la région de la Nièvre le conduit à collaborer avec des botanistes locaux, notamment le Comte Hyppolite Jaubert. Ensemble, ils publient Programme de la Flore du Centre de la France en 1835, jetant les bases d'une étude approfondie de la flore régionale. Boreau, devenu botaniste à temps plein à Angers, élargi ses recherches au Val de Loire, publiant trois éditions de sa flore du Centre.

Tout au long de sa carrière, Boreau participe à diverses sociétés scientifiques, rédige des monographies et résiste à de nombreuses querelles au sein de la communauté botanique. Il s’aligne sur le courant botanique jordanien proposé par son ami Alexis Jordan, défendant des descriptions et classifications méticuleuses d'espèces, plus tard critiquées comme étant trop détaillées. L’ancrage de Boreau dans l’idée de la persistance des micro caractères l'amène à adopter une vision fixiste des espèces, à l’encontre des idées évolutionnistes de Lamarck et Darwin qui se développaient à l’époque.

La direction de Boreau au Jardin des plantes d'Angers a vu les collections s'agrandir, et il a joué un rôle central dans la communauté scientifique de la ville. Son herbier, plutôt européen, présente plus de 18 000 espèces. L'héritage scientifique de Boreau comprend une bibliothèque importante, riche en auteurs anciens et bien sûr une collection de 3 400 lettres provenant de 420 correspondants.

L'impact de Boreau sur la botanique persiste à travers sa flore régionale minutieusement documentée, ses contributions aux sociétés scientifiques, son herbier et sa correspondance complète.

 

Lettres de Bastard, février 1843

Toussaint Bastard, 3e directeur du Jardin des plantes, est médecin à Chalonnes quand il entame avec Boreau des échanges. Bavard, humaniste et colérique, Bastard semble être un personnage haut en couleurs. Les deux botanistes s’apprécient pour leurs compétences mais ils ne semblent pas partager les mêmes opinions politiques et sociales.

 

 

Lettres de Deseglises, 1er octobre 1874

Certains échanges sont très poussés, tel celui avec Alfred Déseglises : 383 lettres sur une période de 25 ans. Les deux botanistes suivaient le même courant jordaniste qui visait à multiplier le nombre d’espèces en se basant sur des micro caractères étudiés en plantation. Cette doctrine fut critiquée car elle complexifiait sérieusement la systématique dans des groupes déjà difficile à discriminer (roses, ronces, piloselles, draves).

 

Note de Troufflaut, 1801

Boreau a récupéré des lettres et notes anciennes via le comte Jaubert par exemple. Celui-ci mécène le début de la carrière de botaniste professionnel Boreau et partage des documents concernant le territoire qui les intéressaient mutuellement entre 1832 et 1838 : le Cher et la Nièvre. Plus tard Boreau agrandira son terrain d’études au Centre de la France et l’étendra même au val de Loire.

 

 

Pour aller plus loin :

 

 

 

Des timbres

On peut voir dans cette succession de missives l’utilisation des affranchissements évoluer. Le timbre postal oblitéré apparait en 1849 et on le trouve fréquemment ensuite sur les courriers. On note également les durées nécessaires pour transmettre un pli à travers la France.

 

Des signatures

Pour aider les botanistes et archivistes à repérer les auteurs dans les archives et sur les étiquettes des herbiers français, un mini site compile les autographes de cette période.

https://www.mbaplan.fr/herbier/

 

Les prédécesseurs de Boreau

La bibliothèque municipale conserve les correspondances de 2 contemporains d’Alexandre Boreau : J.-B. Guépin et A.-N. Desvaux.

 

L’herbier de Boreau

L’herbier d’Alexandre Boreau est en partie numérisé sur le site Recolnat : https://explore.recolnat.org/search/botanique/type=index

 

 

Bibliographie :

 

  • BOUVET G., Boreau son autobiographie in bull. Soc. d’Etudes Scientifiques d’Angers 1895 (manuscrit : Arboretum 1680)
  • BOREAU A., Catalogue des plantes observées dans les départements du Cher et de la Nièvre 1835 (Arboretum 1406)
  • BOREAU A., Catalogue raisonné des plantes phanérogames qui croissent naturellement dans le département de Maine-et-Loire, 1859 (Arboretum 1681)
  • BOREAU A., flore du Centre de la France 1940 (Arboretum 26), 1949 (Arboretum 27), 1957 (Arboretum 28)
  • ROUILLARD Thomas, Alexandre Boreau un naturaliste né, in Camosine, annales du pays nivernais 177 : Mémoires végétales, herbiers de la Nièvre (Toussaint C95487)
  • DEVAUX Guy, Un herbier d'Alexandre Boreau exposé à Nevers. In: Revue d'histoire de la pharmacie, 95ᵉ année, n°359, 2008. pp. 353-354.
  • CANDEGABE Philippe, Matériaux pour une histoire de la botanique en Berry. In Symbioses 2001 5 pp 41-72

 

Thomas ROUILLARD

responsable des collections de botanique et de paléobotanique au Muséum d'histoire naturelle d'Angers

 

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